Votez pour nous !Votez pour nous !Votez pour nous !Votez pour nous !
◄ Votez ◄
Le Deal du moment : -20%
-20% Récupérateur à eau mural 300 ...
Voir le deal
79 €

Partagez
 

 Once upon a time

Aller en bas 
AuteurMessage
Invité
Invité
Anonymous
Invité
Invité
MessageSujet: Once upon a time   Once upon a time EmptyDim 19 Mai - 12:07

Jade sortait de plus en plus dans les faubourgs, quittant son confort pour s'aventurer dans la poussière. Le plus souvent c'était pour aller distribuer de la nourriture et des médicaments pour les ouvriers des mines, mais parfois c'était seulement pour prendre l'air et quitter son quotidien étouffant. Ironiquement, l'air impur et lourde des faubourgs étaient plus respirable pour elle que le domaine des Von Heiligen.

Et puis elle appréciait retrouver ceux qu'elle considérait comme ses amis des mines, ces petits gens qui normalement elle ne devrait pas fréquenter et qui pourtant faisaient partis intégrante de son quotidien.

Ce jour la, elle était avec Helena et Gaius. La petite fille était si adorable que Jade l'aimait tendrement. Parfois elle aurait voulu avoir une petite sœur comme elle, plutôt que de ce coltiner une peste comme Courage. Voilà pourquoi elle prenait grand plaisir à raconter à l'enfant et à son grand-frère toute sortes d'histoire que Jade avait pu lire dans sa jeunesse. Les trois étaient installés sur des marches, un peu en retrait de la place centrale et pourtant pas si loin que ça. Ils pouvaient entendre les bruits des autres mineurs présents, cependant sans être dérangés. Helena était assise sur les genoux de Jade, et Gaius, fidèle à lui-même, adossé contre le mur, un peu à l'écart mais portant cependant une oreille attentive à l'histoire que Jade racontait.

« - Un soir, un petit villageois alla puiser de l’eau dans un vieux puits au cœur de la ville basse. En remontant le seau de bois, il vit quelque chose briller au fond. C’étaient des pièces percées, ces monnaies anciennes qu’autrefois on appelait des sous. Depuis longtemps elles n’avaient plus cours mais le soleil couchant les teintait de nuances d’or. Le gamin redescendit le seau et, à plusieurs reprises, en remonta de nouvelles. La somme était modeste. Pourtant c’était la première fois qu’il voyait autant d’argent car sa famille était pauvre. Émerveillé, il saisit une pièce entre ses doigts, mais elle glissa et tomba. En touchant le sol, elle se changea en un petit serpent aussi beau qu’un bijou. Dressé comme une épée sur sa queue, il dit :

— " Tu m’as délivré d’un mauvais sort et cela mérite récompense. Cette nuit, va enterrer ton argent au Champ des Sortilèges, car je veux faire de toi l’homme le plus riche de la région. Quand tu seras grand, le jour où tu voudras partir vivre ta vie, tu creuseras la terre et tu trouveras à cet endroit un trésor. Mais n’en parle à personne, sinon tu vivras toujours pauvre. "

À la nuit tombée, muni d’une bêche et cachant ses sous dans ses poches, l’enfant courut vers le Champ des Sortilèges. Son cœur battait très fort, car ce champ avait mauvaise réputation. Depuis des années il était à l’abandon. On racontait qu’autrefois il accueillait des sabbats et que sorciers et sorcières s’y étaient livrés à des messes noires et à des enchantements. Dans sa hâte, le garçon n’avait pas remarqué que ses poches étaient percées. À mesure qu’il courait, toutes les pièces s’en échappèrent. En chacune d’elles se cachait l’âme d’un petit serpent. Dressés comme une épée sur leur queue, ils s’en allèrent par les rues du village raconter toute l’histoire.

Devenu grand, le jeune homme chercha du travail dans les commerces et les fabriques. Mais sa vie professionnelle fut un échec cuisant. Il était maladroit et tout lui échappait des mains. Il cassait les objets, les renversait, si bien qu’aucun patron ne voulut le garder. Il n’aimait pas non plus le travail de la terre et ne voulut jamais devenir paysan.
Il n’était doué que pour le chant. Il composait des poèmes et sa voix était magnifique, mais on se moquait de lui parce qu’il n’avait pas de vrai métier.

— " C’est un raté " raillaient les villageois, — " Incapable de gagner son pain et d’avoir de l’argent, même quand il en trouve ! Il devrait se faire sorcier ou charmeur de serpents ! "

Peu à peu, ignoré et moqué de tous, le pauvre garçon tomba dans la misère et finit à la rue. Une nuit, désespéré, il retourna près du vieux puits et trouva, appuyée contre la margelle, une mystérieuse boîte noire. Elle contenait un violon. Dès qu’il posa l’instrument sur son épaule et prit l’archet, celui-ci se mit à jouer tout seul une danse endiablée. Quel était ce miracle ? C’était la première fois qu’il avait un violon entre les mains et il savait en jouer !
Plein d’espoir, il s’en alla sur le ruban sans fin des routes et des chemins. Contre quelques pièces que lui jetaient les passants, il chantait tandis que son violon jouait seul des airs de danse. Sa musique avait le pouvoir de guérir tous les maux du corps et de l’esprit. Au son des danses endiablées, les mal aimés retrouvaient l’amour, les vieillards leur jeunesse, les malades la santé, et tous se mettaient à sauter et danser.
Tous les matins, dès que le vagabond saisissait l’archet entre ses doigts malhabiles, le violon l’entraînait jusqu’au cœur des villages. Alors l’âme des gens, parfois si alourdie des peines de la vie, se soulevait de joie le temps d’un air de danse. Jusqu’à son dernier jour, le musicien parcourut la terre entière en semant des notes de bonheur sur son passage. En revanche, il ne réalisa jamais ses rêves de richesse. Fut-il heureux ? Qui sait ? Un violon enchanté, c’est un trésor plus grand que quelques sous percés !
»

En disant cette dernière phrase, Jade avait fait frotter son nez à celui d'Helena, d'un geste tendre, voire maternel, ce qu'on appelait un bisou d’esquimau. Pendant toutes l'histoire, Gaius et sa sœur l’avaient écouté sans parler, comme adsorber par l'aventure de ce petit villageois.
Gaius Keegan
Ouvrier
Gaius Keegan
Gaius Keegan
Gaius Keegan
MessageSujet: Re: Once upon a time   Once upon a time EmptyMar 21 Mai - 14:00


[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]


J’ai bossé de nuit, cette fois. J’ai dormi quelques heures, une poignée, avant de sortir avec Helena. De base, on allait chercher de quoi manger – rêvez pas, on n’a pas l’argent pour mais on comptait bien s’en trouver. J’aime pas voler à ceux qu’ont pas plus que moi, le problème, c’est que quand y’a une question de survie, j’regarde plus à qui j’prends. Ou j’suis bon à crever au fin fond de ma cabane. Helena m’en touche pas mot, elle a bien compris qu’on avait pas d’autres choix, bien que ça l’emmerde probablement autant que moi. Mais on a croisé Jade… Elle nous a proposés de rester un peu avec elle et j’ai pas pu refuser, Helena l’adore. Moi, ça va, disons qu’elle m’gêne pas – c’est assez rare pour que j’le dise. Les mains enfoncées dans les poches, j’me suis appuyé contre le mur et j’ferme à demi les yeux alors que Jade commence son récit. J’sais pas trop quoi penser d’elle, vous savez, les filles, j’les fréquente pas tellement – Helena compte pas. Mais elle me met à l’aise, p’t’être parce qu’elle fait jamais la grimace, même si j’sens sûrement le chien mouillé, que j’ai des cernes et l’air aussi aimable qu’un Milicien constipé (j’en ai pas vu, mais j’aime bien l’image). Helena, elle a mis sa jolie robe, la bleue avec le col rond. Elle a coiffé sa tignasse blonde qui retombe joliment de chaque côté de ses joues creusées. Pour une gosse, Helena n’a pas vraiment les rondeurs de l’enfance – même si elle vire à l’adolescence mais bon, sans vouloir critiquer ma sœur, elle est pas épaisse, elle est même relativement maigre. Elle paraît même bien plus jeune par sa fragilité. Ca m’fait chier, de voir les brindilles qui lui servent de jambes. Pourtant, j’lui donne tout c’qu’on a, j’mange après elle, mais j’la soupçonne de se sacrifier pour m’en laisser.

Préoccupé, j’dois dire que l’histoire de Jade m’aide, quelques minutes, à me changer les idées. J’aime bien, quand elle nous raconte des histoires. J’aime encore mieux y croire. Ca peut donner de l’espoir. Même si là, la morale de l’histoire, elle me passe bien au dessus de la tête. Entre un truc enchanté et de l’argent, franchement, si j’devais choisir, j’préférerai manger tous les jours qu’amuser la galerie. Pourquoi les gens, y sont malheureux alors qu’ils ont un toit sur la tête, de la bouffe dans leur assiette ? Déjà, si t’as tout ça, t’as déjà plus que la majorité des gens qui crèvent ici. Une certaine tristesse m’passe dans le regard, j’sens comme un poids sur mon cœur, c’est comme un voile, léger mais étouffant, j’ai du mal à respirer au travers. A moins qu’ce soit la poussière de la mine ? Je tousse et je me force à cracher par terre, c’qui arrache une grimace écœurée de ma sœur.

_ T’es dégueu, Gaius.

_ Roh, ça va, j’t’ai pas craché à la gueule.

Ouais, j’suis pas l’exemple même de la délicatesse mais Helena en a l’habitude. Ma sœur, elle préfère tourne ses yeux verts en direction de ceux de Jade. Elle l’admire, j’le vois bien dans ses prunelles, alors qu’elle sourit avec toute sa douceur qui creuse ses fossettes.

_ Merci pour cette histoire, je l’ai beaucoup aimée… J’aimerai bien trouver un violon enchanté. Et soigner tout le monde de la Mine ! J’suis sûre que je ferai même danser Gaius !

Ma sœur affiche sa petite tête de canaille et j’fais mine de grommeler, mais elle se détache doucement de Jade pour venir jusqu’à moi. Ses mains minuscules se referment autour de mon bras énorme comparé aux siens et elle me tire pour que j’m’approche. J’finis par me dégager dans un geste un peu brusque, mais ma sœur ne s’en affole pas, se contentant de sautiller un peu sur elle-même.

_ Qu’est ce que tu en penses, de l’histoire, Gaius ?

_ Que le mec, il est franchement con. A sa place, j’aurais vendu le violon pour avoir des sous. Ceux qui disent que l’argent, ça achète pas le bonheur, c’est qu’ils en ont jamais manqué. Les soins, ça se paye, comme la bouffe, un lit, et c’est pas le bonheur qui te tient en vie.

_ Bah la tristesse non plus !

_ Ouais enfin j’serais pas triste si j’avais pas l’estomac vide et si j’pouvais dormir tranquille.

Ma sœur cligne des yeux et j’vois l’inquiétude traverser son regard. Bourru, j’enfonce ma grosse main dans sa tignasse blonde et j’cogne affectueusement sa tête contre mes abdominaux – un câlin d’ours, comme j’dis. Ma sœur râle, mais glisse ses bras autour de ma taille.

_ J’suis pas triste, juste fatigué.

J’veux pas qu’elle s’inquiète pour moi. J’frotte un peu son crâne et elle finit par se détacher de moi. Elle retourne vers Jade, puis s’assoit près d’elle en reposant ses mains sur ses cuisses.

_ Si j’avais plein d’argent, hm… Je m’achèterai une auberge pour avoir tout le temps à manger et pouvoir dormir quand je veux ! Et toi Gaius ?

_ Ca me semble être un bon plan. Et toi, Jade ? Qu’est-ce tu ferais si t’avais des sous ?

On sait pas c’qu’elle est, d’où elle vient. On croit qu’elle est comme nous – on la traite pas différemment. Oh Helena a p’t’être même perdu ses doigts fins dans les poches de Jade pour récupérer quelques pièces mais on n’a pas bien l’choix. On pourrait lui demander mais à quoi bon ? Pour s’faire traiter de mendiants ? J’préfère encore qu’on m’accuse être un voleur. Puis bon. Une fois sur deux, j’me sens tellement coupable que j’ramène l’argent pris à Jade, que j’lui glisse entre les doigts en avouant franchement qu’Helena a fait sa chipie… Tout c’qui brille, ça l’attire, une vraie pie tout court en fait.  On se doute même pas que c’est une Von Heiligen – sinon, on l’aurait même pas approchée et j’serais pas aussi sympa avec elle. Mais voilà, j’aime bien sa compagnie, c’est une fille douce, attentionnée et d’puis qu’elle a ramené une robe à Helena, la gamine ne la vole plus. Elle me tanne même tout le temps pour mettre cette robe – j’ai même pas conscience de sa valeur- j’ai l’impression d’passer mon temps à la nettoyer et la rafistoler.

J'hésite mais j'm'approche, jusqu'à m'accroupir près de Jade. Sous mon débardeur, on devine les muscles développés de mon dos. Mes bras sont couverts de bleus, j'ai une égratignure sur la joue. Ouais, franchement, j'ai une sale gueule, ajoutez les cernes qui amochent encore plus ma tête de taulard et vous avez le tableau. J'espère que j'pue pas trop, j'ai pas envie d'gêner Jade, surtout qu'elle, elle sent toujours... je sais pas. Un truc doux qui sent bon, un peu comme les fleurs mais en mieux. Ouais, une odeur de lessive quoi. Nan, j'me sens pas bien, j'fais tâche, à tous les coups, j'veux pas l'embêter, alors j'me relève, j'préfère m'éloigner de quelques pas, les mains dans les poches. Faut dire qu'y pleut, alors ouais j'suis souvent lavé par l'eau, le savon, j'y touche plusieurs fois par s'maine mais c'matin, j'ai pas eu le temps d'me nettoyer et après avoir bossé pendant 9 à 10 h au fin fond de cette mine pleine de poussières, à avoir sué comme un boeuf... Non, c'est mieux que j'me tienne loin, j'sens même la honte m'rougir les joues et j'enfonce un peu ma tête entre mes épaules, poussant du pied quelques cailloux.


Dernière édition par Gaius Keegan le Sam 25 Mai - 18:47, édité 1 fois
Invité
Invité
Anonymous
Invité
Invité
MessageSujet: Re: Once upon a time   Once upon a time EmptyMar 21 Mai - 20:07

Jade resta silencieuse pendant plusieurs secondes, se contentant de sourire en écoutant le frère et la sœur parler entre eux, où plutôt se chamailler. Elle trouvait ça vraiment mignon, car même s'ils étaient en désaccord, cela ce voyait qu'ils avaient une très grande complicité l'un envers l'autre. Parfois elle aimerait aussi être complice avec Courage, mais cette pensée ne dure jamais bien longtemps car elles sont trop différente, et que sa sœur n'est qu'une pestouille.

Elle soupira un moment, se disant que peut-être elle n'avait pas choisit la bonne histoire. Enfin, pour Helena si car la petite avait semblé apprécié le récit, mais Gaius était plus réticent. En même temps, raconter une histoire sur un personnage pauvre, qu'elle idiote faisait-elle. Il était normal que Gaius s'identifie au héros. Parfois Jade oubliait que Gaius avait son âge, car il lui apparaissait plus comme un petit garçon d'à peine quatorze ans. Et puis ils étaient très différents, déjà physiquement car ils ne venaient pas du même monde, mais aussi leurs façons de parler étaient à l'opposée l'une de l'autre. Le jour et la nuit. Gaius ne mâchait pas ses mots, il était grossier et impolis, et il jurait beaucoup. Cependant Jade ne lui avait jamais reproché son langage. Qui était-elle pour le faire, de toute façon ?

Lorsque Gaius lui posa la question de ce que elle, elle ferait avec de l'argent, elle fut très embarrassée. De l'argent, elle n'en manquait pas, jamais, contrairement à eux. Elle avait d'ailleurs surpris une fois Helena lui faire les poches pour en dérober quelques pièces, et Jade n'avait rien dit. Et ce, même lorsque prit de culpabilité, Gaius lui ramena l'argent volé. Au contraire, Jade apporta même une robe à l'enfant, la lui offrant. La Von Heiligen se disait qu'elle devrait apporter des robes supplémentaires pour Helena, mais cela voulait dire en chiper à Courage, parce qu'elles avaient à peu prêt le même âge elles deux, et que si Jade lui donnait des robes lui appartenant, elles seraient bien trop grandes.

« - Oh hum...

Elle se pinça la lèvre inférieure pour réfléchir. Que pouvait-elle bien répondre ? Elle n'avait pas envie de leur mentir, mais il ne pouvait pas non plus avouer qu'elle était une Von Heiligen.

- Je pense que je créerais un foyer d'accueil. »

Elle souriait doucement. En soit, elle ne mentait pas. Elle était riche certes, mais l'argent appartenait à son père et non à elle. Si Jade avait son propre argent et une fortune aussi conséquente que celle de Jasper, elle construirait un foyer pour les orphelins, les miséreux, les sans-abris... Tout ceux qui avaient besoin d'aide.

Et puis elle remarqua que Gaius tenta une approche, puis s'éloigna aussi vite qu'il était venu. Avait-il honte de ce qu'elle dégageait ? Bien sur il n'était pas aussi présentable qu'elle, mais les choses n'étaient pas comparables. Cependant elle ne voulait pas le lui faire remarqué pour ne pas le froisser, alors elle se contenta de lui sourire.
Gaius Keegan
Ouvrier
Gaius Keegan
Gaius Keegan
Gaius Keegan
MessageSujet: Re: Once upon a time   Once upon a time EmptySam 25 Mai - 18:52


[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]


Helena, elle fait crevette à côté d’Jade. Le docteur là, il a dit qu’on avait pas mal de carences, elle et moi. Helena, elle en sort toute fragile, toute maigre et elle flotte dans sa robe, j’la soulève d’un bras sans trop d’efforts. Moi, j’sens des fois les crampes qui m’tordent dans tous les sens, la fatigue et cette rage qui m’quitte pas. J’me sens toujours à cran, même quand j’me couche, j’suis tendu comme un arc, j’ai l’cœur qui bat comme un fou dans ma cage thoracique, j’ai cette douleur dans les articulations, comme un vieux con. Ouais, pour nous, imaginer un endroit où on pourrait manger et dormir comme on veut, ça s’rait le paradis. Peu après la mort de papa, j’avais pas les sous d’payer la maison, on avait pas assez. Alors depuis, on crèche dans une cabane que j’ai construite avec quelques tôles, des palettes, ça craint, c’est froid, humide avec ce temps de merde, cette pluie qu’arrête pas de nous tomber sur la tête. Ma sœur, des fois, elle dort chez ceux qui l’emploient, moi, j’squatte dans des cachettes pas sûres mais où un type comme moi risque pas grand-chose à part s’faire grignoter par les rats – tant mieux si j’sers d’appât, comme ça, j’les choppe et j’leur éclate la tête d’un coup de pierre. La seule viande qu’on mange, c’est ces trucs que j’arrive à attraper dans mes pièges ou dans mes mains de pierre.

La réponse de Jade, elle est jolie. J’sais pas comment décrire autrement, faut dire que ça envoie un peu d’espoir, ça fait sourire qu’elle pense aux autres comme ça. Pendant quelques secondes, j’me dis que j’vaux vraiment rien, à penser qu’à moi et ma sœur, alors qu’on pourrait aider d’autres personnes. Mais on a l’habitude d’être à deux contre le monde, de se débrouiller entre nous, bien que d’puis quelques temps, des gens nous tendent la main. On n’y est encore pas trop habitués et face à cette gentillesse – ouais au lieu de dire jolie, j’aurais pu dire « gentille » ou je sais pas -, j’me sens comme une poule avec une fourchette. J’sais pas comment réagir en face, j’sais même pas quoi en penser, parfois, ça m’énerve juste de faire pitié.

_ Un foyer d’accueil ?

Helena a demandé, d’une voix timide. Elle et moi, on n’a pas vraiment d’culture. En fait, on dit même qu’on est cons, on sait pas lire, pas compter, on connaît pas grand-chose. Par contre, Helena, elle sait cuisiner, elle fait bien le ménage, elle sait sourire. Ce sourire qui réchauffe le cœur. Ce grand sourire qui éclaire toute sa bouille d’ange, qui fait briller ses yeux verts, qui donne quelques rougeurs à ses joues creusées. Moi, j’sais juste taper sur des cailloux – ou des gens – mais ça faut pas s’en vanter. J’sais aussi pousser et porter de gros trucs mais ça aussi, vaut mieux pas l’dire, ça m’fait juste passer pour un crétin. Ah, et j’sais coudre ! Mais ça, pareil, j’le crie pas sur tous les toits, j’ai pas envie qu’on s’foute de moi.

_ En gros c’est une grande maison où les enfants qu’ont rien y vont, on leur donne à bouffer, ils peuvent y dormir et on s’occupe d’eux.

_ J’aimerai bien aller dans un foyer d’accueil.

Helena, elle a son sourire, mais sur c’coup là, ça m’serre le cœur. J’sais pas trop pourquoi, p’t’être parce que m’prendre dans la tête qu’elle crève la dalle, qu’elle a pas de lits dignes de ce nom, qu’elle est seule toute la journée, c’est comme si on m’filait deux trois gifles dans la tronche. J’détourne les yeux et j’baisse la tête vers le caillou que j’pousse du bout du pied.

_ Te plains pas, tu m’as moi. Y'en a qu'ont plus rien.

Sur ces mots, j’ai redressé la tête, presque fièrement. J’ai tourné mes yeux vers Helena qui unit naïvement ses yeux aux miens et un soupir s’arrache de mes lèvres. Elle sent bien l’reproche dans ma voix et elle baisse la tête, mal à l’aise, serrant ses mains contre son ventre creux. J’frotte le mien, avant d’porter la main à ma poche. J’y récupère les 4 misérables pièces qui traînent et j’les fais tourner au creux de ma paume, comme si j’les comptais alors qu’en fait, j’ai aucune notion des chiffres.

_ On allait acheter à manger, tu veux venir avec nous ?

J’ai levé le nez vers Jade en glissant les quelques pièces au fond de ma poche. C’est en partie l’argent qu’j’ai gagné en un mois d’salaire, après avoir payé le terrain qu’on a pour notre p’tite cabane et le jardin minuscule qu’on entretient. Enfin une pièce, c’sont les peaux de rat que j’ai vendues, une vingtaine de peaux au total, c’est pas mal. Helena, elle attend que Jade parle, puis elle la suit. J’attends qu’elles m’rejoignent, puis j’marche près de Jade, les mains dans les poches. Ma démarche est lente, chaloupée, j’ai l’dos courbé par les poids que j’me traîne toute la journée. J’sais plus vraiment me tenir droit, d’façon dans les mines, j’avance toujours plié. Ma sœur, elle reste près de Jade et sa main maigrichonne, pleine d’os et couverte d’une peau plus pâle que la mienne, accroche timidement celle de notre amie. Avec nous, elle risque pas d’se faire voler, d’ailleurs, personne fait trop attention à nous. Tant mieux, la discrétion d’temps en temps, j’y dis pas non, ça m’fait du bien d’pas attirer les regards offusqués ou outrés.

Instinctivement, un type vient en face de nous. Vu sa gueule, il est bourré. Il titube vers nous, mais protecteur, j’m’avance d’un pas, dépassant Jade et d’un mouvement de mon bras libre, j’écarte le type sans douceur. Il trébuche et retombe sur les genoux, mais est trop éméché pour dire quoi qu’ce soit. J’me contente d’un r’gard mauvais à son encontre, mon bras maintenant c’lui tout fin de Jade dans un geste protecteur, j’la garde près de moi.

_ Helena, t’écarte pas.

_ Oui, Gaius, je sais.

Ma sœur garde son sourire, heureuse de tenir la main de Jade. Elle a la joie facile, tiens. Ca m’arrange. On r’joint finalement la petite boutique, où y a quelques légumes, pas grand-chose mais pour nous, c’est déjà énorme. D’ailleurs, v’là qu’Helena lâche finalement Jade pour s’approcher des quelques caisses qui renferment patates, poireaux, navets ou encore, quelques pommes. Les prix sont affichés sur les caisses, mais j’les regarde pas, j’sais pas lire alors bon. Helena prend une pomme grise entre ses doigts, et l’marchant, un homme moustachu, nous accueille avec le sourire. Il est habitué à nous voir. J’sais pas trop c’qu’on peut prendre, avec ces 4 pièces, mais c’est plus que d’habitude. J’prends deux pommes de terre, deux navets, j’hésite. J’pose finalement les patates, j’prends un poireau à la place. Oh et puis finalement, j'prends deux patates. Ca devrait l'faire non ? Helena s’approche d’moi, sa pomme entre les doigts. J’hésite, j’fixe la pomme, puis ses yeux verts.

_ Si ça coûte trop cher, c’est pas grave.

Helena sourit et va pour reposer la pomme. J’retiens son bras maigre, bourru, j’lui fais signe de poser la pomme dans le p’tit sac que j’aie. Helena a un sourire ravi et pose la pomme, en prend une deuxième qu’elle pose dans mon sac.

_ Pour Jade !

_ S’tu veux.

J’soupire et j’m’approche du comptoir. Le marchand, il prend tout, il regarde, il pèse. Moi, j’sors mes 4 pièces. Le mec, y r’garde ma main et affiche un sourire.

_ Quatre pièces.

J’cligne des yeux… 4, dans ma tête, j’sais pas combien c’est, alors après une hésitation, j’pose tout sur le comptoir. J’regarde avec une certaine stupeur toutes mes pièces disparaître. J'attends. Mais rien m'revient. J’ai l’cœur qui s’serre, putain, j’ai déjà plus rien ? J’ai les mains moites, quand j’prends le sac, j’essaye de me convaincre qu’il pèse lourd, pour m’dire qu’on aura à manger, qu’on va pas manquer. J'regarde le type, y range les pièces, y dit rien, y fait plus rien.

Dommage que j’sache pas lire. Si j’avais pu, j’aurais vu que le type, il me fait payer un peu plus du double que c’que j’lui dois. Faut croire que la misère, elle touche tout le monde, même ce type dont les étalages sont pas vraiment pleins et qui a une poignée d’enfants à nourrir. Dans ces faubourgs, faut pas croire, la misère, elle est partout et elle fait r’ssortir le plus mauvais de l’homme. Moi-même, j’ai les mains salies pour avoir arraché de l’argent à des gens pas mieux lotis que moi… Parce qu’au bout d’un moment, c’est une question de survie, plus d’honneur ou de moralité, hein. Juste avoir de quoi vivre un jour de plus. Helena, elle s’rend pas compte alors que Jade, elle voit probablement mon teint bien pâle. C’est l’argent censé finir notre semaine que j’viens de perdre.

J’ai le cœur gros, même quand j’prends la pomme pour la glisser entre les doigts de ma sœur. Elle s’empresse de croquer dedans et face à son bonheur, j’sens mon cœur qui se transperce quand j’me vois obligé de lui murmurer.

_ Mange pas tout, juste deux bouchées, garde la pour ce soir okay ?

Helena cligne des yeux et j’préfère plus la regarder. J’aime pas sentir cette boule dans ma gorge, l’impression d’éclater. Ca me déchire de l’intérieur, comme si j’avais avalé des morceaux de verre et Jade m’voit peut-être baisser la tête, le regard affolé, tant de mal dans le cœur que j’ai les yeux écarquillés, les muscles, tétanisés.
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
MessageSujet: Re: Once upon a time   Once upon a time Empty

 
Once upon a time
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Draümbell City - Forum RPG - Steampunk :: Sältzbürg :: Zone d'habitation :: Place centrale-
Sauter vers: