Une bonne grosse baGagarre.

Morgan était épuisé... était-ce dû au travail dans les mines, de plus en plus épuisant, ou au fait qu'il menait le rébellion presque seul, depuis que son fier patron avait terminé au lit avec des symptômes plus qu'inquiétants ?
Parce que oui... Edouard Pikes ne parvenait plus à se lever. La maladie lui était tombée dessus avec une violence rare, et il restait désormais dans une sorte de semi-coma inquiétant, peuplé de délires et rythmé par une toux que Morgan n'aimait pas du tout.

A force de rester aux côtés de son ami, Morgan aussi avait commencé à tousser et produire de la fièvre. Oh pour lui ce n'était rien, et il ne faisait pas le lien.
Par déni, ou parce qu'il n'en avait pas le temps ?
C'est vrai qu'il était chargé, il n'avait presque plus le temps de boire. La famille Von Heiligen avait-elle fini par faire le lien entre lui et la rébellion, ou était-ce un hasard si on l'envoyait beaucoup plus dans les profondeurs qu'avant ?
Il fallait dire aussi qu'il était productif, et son équipe n'avait presque pas perdu de membres depuis le début de l'année. L'un des contremaîtres le lui avait dit : « ils t'ont repéré en haut, Walsh. Tu leur plaît ».
Qu'ils aillent se faire foutre !

Quoiqu'il en soit, le chef de groupe était sur les nerfs, stressé, inquiet et surchargé par les responsabilités. Ses finances aussi étaient dans le rouge et il ne savait plus comment faire vivre la Rébellion.
Parce que la maladie et le Tag avait un peu éclaté les révoltés, et sans Edouard il peinait à maintenir tout le monde à flot.
Il avait besoin de faire parler ses poings.

L’arène des souterrains n'était pas légale, bien sûr, pas plus que l'alcool et les jeux d'argent. Le sable de la piste sentait la sueur, le sang et les excréments. Autour les barrières avaient été installées pour empêcher les spectateurs de venir finir eux-même leurs champions, en cas d'échec.
C'est qu'on pariait gros ici... vraiment très gros... et que certains marchands étaient même arrivés à faire fortune comme ça.

Il fit son entrée sur la piste en étouffant sa toux sèche, qui lui râpait les poumons : torse nu, les mains bandées jusqu'aux poignets, les pieds nus...
Qu'importe qui serait son adversaire : il allait terriblement souffrir.
Parce que Morgan Walsh avait de la rage plein les tripes, et besoin de la faire sortir.

Voilà deux-trois jours que Gaël commençait à se sentir mal. Il ne mangeait plus beaucoup et ses kilos commençaient à fondre petit à petit. En seulement trois jours, c'était assez bluffant. Et puis il avait choppé une vilaine toux et se sentait frileux. Cependant il ne voulait pas croire être touché par une quelconque maladie. Pas lui voyons. Et comme pour se donner la preuve à lui-même qu'il allait bien et que ce n'était pas un petit rhume qui allait le clouer au lit et l'empêcher de vivre sa vie, et bien c'était donc tout naturellement que ce soir là, cet abruti c'était rendu dans la zone-souterraine au lieu de se reposer.

Il avait encore quelques séquelles de ses côtes douloureuses, car ce genre de blessures de se soignes pas en quelques jours, mais plutôt semaines. Et pour lui, comme il continuait de pratiquer des combats et bien ses blessures ne pouvaient pas guérir convenablement, alors il avait toujours un peu mal par endroit.

Ce soir là, il ne voulait pas être simple spectateur. Malade ou non, il comptait bien aller défoncer quelques petites gueules. Il entra sur le ring torse nue, mains bandées, pieds-nues et prêt à ruer de coups son adversaire. Et vu la dégaine qu'il avait, c'était certainement un gars des mines. Il y en avait beaucoup ici qui venaient pour se détendre et tenter de passer le temps. Et certains mineurs étaient assez redoutables comme adversaires. Bien que la plupart étaient faibles et maigres, certains, comme celui en face de lui, avait une bonne carrure à force de porter de lourdes charges. Tant mieux, ça ferait un bon défoulement et divertissement.

La cloche sonna le début du combat, et sans attendre pour créer un effet de surprise, Gaël commença fort avec un coup de poing dans le menton. La mâchoire de son opposant était assez dure, mais il savait que le coup avait dû lui faire mal. Mais putain, juste le fait d'avoir donné ce coup de poing lui avait fait mal. Si le combat commençait comme ça et qu'il se blessait tout seul, il était bien incertain de gagner.

Tu feras attention au gars en face de toi, lui avait dit le gars qui l'avait reçu avant d'entrer dans l'arène, c'est pas un rigolo, il est bon.
Bon ou pas, Morgan s'en fichait, il ne venait pas simplement pour gagner juste... pour se défouler. Il était déjà parvenu à recruter des gens de ce milieu d'ailleurs, pour les rattacher à sa rébellion qui peinait à démarrer.

Malgré cet avertissement, Morgan observa un instant le type qui lui faisait face, en se disant qu'il n'avait pas l'air bien vaillant, pour un « bon ».
Il avait tort. Le coup qui le cueillit était précis et bien lancé, même s'il lui paru un peu mou... sa tête partit vers l'arrière et il fut sonné, mais pas assez longtemps pour ne pas revenir rapidement dans le combat et asséner lui-même un violent crochet du gauche, juste contre l'oreille.

Tout était permis dans cette poul, il n'y avait aucune limite et aucune règle hormis deux éléments – pas toujours respectés d'ailleurs – on ne tue pas son adversaire, et on ne vise pas les couilles.
Et c'était valable même pour les incroyables femmes qui venaient de battre ici !

S'écartant pour mieux jauger son adversaire, Morgan n'attendit pas qu'il se remette d'un coup d'avant pour enchaîner avec un pas fouetté – toujours visant la gauche – qui cherchait à massacrer les cotes.
Il ne se retenait pas
Mettait dans ses coups toute la violence ont il était capable.
Le sang battait à ses oreilles, ainsi que cette colère qui ne partait jamais et il continuait à vouloir frapper, massacrer.
Parce qu'il savait que l'homme en face saurait tenir le coup.

Tenir le coup, tenir le coup...
Ouais c'était vite dit. Les coups envoyaient, normalement Gaël les aurait évité. Mais la il en était bien incapable. Tous ses gestes étaient douloureux et c'était comme s'il agissait au ralentis. Pas spécialement une bonne chose pour un combat sur le ring.

Il se prit le coup prêt de l'oreille sans vraiment penser une seule fois à l'esquiver. Et outch, ça faisait mal, il voyait flou pendant quelques secondes, ce qui laissa le temps à son adversaire de venir lui démonter ses côtes déjà bien douloureuses. « Hmpf ! » Mais il n'allait pas se laisser malmener comme ça, oh non. C'était pas un rigolo de mineur qui allait venir à bout de lui.

Il se redressa d'un coup et s'approchant, feintant un coup de poing sur la droite sans grande force, espérant qu'il tente de l'éviter... et il en profita. Il attrapa la nuque du mineur, et brusquement et assez violemment lui fit un croche patte, l'accompagnent dans sa chute à l'aide de la prise qu'il avait sur la nuque.

Le mineur se retrouva la tête sur le sol, et Gaël lui donna un gros coup de pied dans les côtes. Œil pour œil, dent pour dent, côte pour côte. Et il ne s'arrêta pas de suite. Il profitait du fait que son adversaire soit au sol pour enchaîner un second coup dans les côtes histoire d'être bien sur de lui faire mal. Après tout ce n'était pas juste que Gaël soit le seul à morfler.

Il se recula ensuite, prit d'un vertige et dû se tenir à la corde du ring, et tout en toussant il essayait de garder un contact visuel avec le mineur. Ne pas le perdre de vu pour essayer d'anticiper son attaque.
En vain.

Morgan esquiva en effet, et il se prit de plein fouet la seconde attaque prévue par son adversaire.
Le Professeur n'était pas malin quand il se battait, il mettait juste toutes ses tripes dans l'affaire en cognant comme un damné, suivant son instinct plus que son cerveau.

Les coups qui pleuvaient sur lui tirèrent à sa gorge serrée des râles de pure souffrance.
Mais il était un Minier... la souffrance il l'avait épousée dès son plus jeune âge, à partir du moment où son père avait commencé à le battre, trop imbibé pour trouver une autre activité.
Oui, Morgan n'était plus très épais : fatigué, maigre, alcoolique à son tour, il n'en gardait pas moins cette force propre aux hommes désespérés, qui n'avaient plus que la simple vie à laquelle se raccrocher.

Lorsque son adversaire se recula, le chef de groupe se releva en titubant, crachant au sol un long filet de salive sanglante. Il se frotta les cotes en grimaçant, frissonnant sous la vague de douleur qui irradia dans son flanc.
Il allait tuer ce type.

Ne respectant toujours aucune règle, il se jeta sur son adversaire, s'empara de ses cheveux et lui asséna un coup de boule qui produisit un bruit sonore dans la salle, avant de balancer l'autre au sol.
Il serra les poings, sentant toujours le sang dans sa bouche et la douleur dans ses cotes.
Cassées.
Ses poumons faisaient un bruit de soufflerie et tout tournait autour de lui.

Crachant une nouvelle fois au sol il lâcha, la voix mauvaise, hargneux.

« Allez belle gueule, relève-toi, ramène ton petit cul par ici, que je le défonce »

Putain de bordel de merde à queue.
Le choc fut violent, très violent. Le coup de boule aurait certainement assommé plus d'un homme tellement le mineur y avait mit toute sa rage et son cœur. Gaël ne comprit pas ce qui venait de se passer et de lui arriver. Il ressentait une énorme douleur sur le front, assez forte même pour lui ouvrir l'arcade sourcilière qui était déjà en mauvaise état suite à son agression de mois dernier.

Et il tomba au sol - enfin c'était plutôt son adversaire qui le balança comme une merde au sol à l'autre bout du ring. Ce fut compliqué de se relever car il avait la tête qui tournait, ses côtes qui lui faisaient très mal, le souffle court et une envie de tousser qui venait lui gratter la gorge.
Sans parler des sueurs et des frissons qu'il avait. Putain de maladie.

Mais les mots du mineur l'aidèrent à se relever, parce que bon même à l'agonie Gaël n'allait pas manquer une occasion d'ouvrir sa gueule. « T'es mignon, dans d'autres occasions je t'aurais volontiers laissé me défoncer le cul.. » Il souriait d'une manière insolente alors qu'il se relevait péniblement, sentant une petite traînée de sang couler le long de son arcade jusqu'au coin de son œil. « Mais la je vais plutôt te défoncer tout court. »

D'un coup il se rua sur le mineur, comme s'il se laissait tomber sur lui, venant lui attraper les épaules pour prendre appuie et... bien, appuyer de toutes ses forces ce qui lui arracha une putain de grimace de douleur. Le mineur maintenant penché, Gaël remonta rapidement son genoux et celui-ci vint se heurter d'une très grande violence dans la mâchoire de son adversaire.

Défoncer le... mais il ne mangeait pas de ce pain là enfin ! Quoi ? C'était un de ces gars qui écartait les cuisses devant les autres mâles ? La pratique existait bien aussi dans les Faubourgs mais il n'y était pas très favorable... c'est que... enfin... vous voyez quoi ? La reproduction, la famille à l'ancienne, tout ça... il y avait bien quelques couples du même sexe mais on ne les voyait pas forcément d'un très bon œil. Ce genre de choses c'était pour les nobles.
Attendez... c'était quand même pas un foutu noble en goguette hein ? Si ?

Morgan n'eut pas l'occasion de réfléchir plus avant à la question : le petit malin reprenait du poil de la bête et semblait décidé à lui briser la mâchoire.
Impossible de sauver son visage, mais au moins il essaya de profiter de la position – bien peu stable – de l'autre combattant, pour le choper par les épaules et essayer de l'envoyer voler plus loins, contre les barrières de sécurité de l'arène.

Mais il ne sut pas s'il y était parvenu, il tanguait désormais, en sentant que ses lèvres étaient explosées et qu'il peinait à bouger sa mâchoire. Il essaya de bouger la tête et se fila même une petite claque pour essayer de se réveiller, parce qu'une série de grosses mouches noires voletait devant ses yeux. Il sentit qu'on essayait de l'attraper par le bras, et qu'un autre gars se déplaçait aussi vers son adversaire pour le retenir à son tour.

« Dégagez ! »
Hurla à moitié Morgan, non sans grimacer en sentant de nouveau la douleur dans tout son visage.
« J'vais le cramer ! »

Mais la poigne sur lui était plus forte, et il avait beau se débattre il n'était pas en état.

Héhé, il était assez fier d'avoir réussi son coup. Mais il faisait quand même moins le malin d'avoir été poussé, car avec le genoux en l'air il n'avait pas d'équilibre et Gaël tomba lamentablement sur le cul, son crâne venant heurter le sol. Bordel... Un coup de boule et maintenant ça. C'était vraiment une soirée de merde, et Lukàs allait lui en foutre plein la gueule lorsqu'il rentrerait.

Mais il n'allait pas s'arrêter la, ça non. Il voulait carrément butter ce petit enfoiré et il s'en foutait des conséquences. Gaël se relevait avec difficulté, voulant de nouveau s'approcher de cet enflure de Mineur, mais un type lui retenait le bras. Il tourna son visage vers lui, et le type lui fit clairement comprendre que c'était la fin du combat.

Il entendait l'autre con brailler et bon, en grande gueule qu'il était, lui aussi se mit à pousser la chansonnette. « Va s'y viens je t'attends ! » Gaël cracha au sol un filet de bave sanglante, regardant son adversaire dans les yeux, essayant de se dégager des prises du mec qui le tenait, mais c'était peine perdu car deux autres étaient venu pour le maintenir, tout comme d'autres gars avaient rejoint le mineur pour le maintenir également.

« T'attends quoi hein ? » Chercher la merde c'était un passe temps assez con, mais bon. Une quinte de toux le prix et il cracha littéralement ses tripes à la gueule d'un des mecs qui le tenait. Et bah bien fait pour eux.

Mais bon... Gaël connaissait ses limites, il savait qu'un autre coup et hop, il serait KO. Mais c'était un risque à prendre si c'était pour maraver la gueule du mineur. Il donna un coup de tête en arrière ce qui fit lâcher les trois types, et il s'approcha d'un pas rapide vers son adversaire qui lui aussi avait réussi à se libérer de l'emprise des gars, et s'approcher de lui.

Comme dans un ralentis. Deux poings se levaient. Deux joues explosées. En même temps, chacun des adversaires se donnaient un coup de poings dans la gueule. Et en même temps les deux crétins tombèrent au sol.

KO.